Bienvenue sur le site du 62e Congrès de la SAES !
Il s’est tenu à Rennes du 1er au 3 juin 2023 autour du thème « Transmission(s) ».
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Invitée d’honneur : Jackie Kay
Conférence plénière: « IN THE SPACE BETWEEN: The Construction of a Multiple Self »
Née en 1961 à Édimbourg d’une mère écossaise et d’un père nigérian, Jackie Kay fut adoptée à sa naissance par un couple blanc et grandit à Glasgow dans une famille marxiste (son père travaillait pour le parti communiste, sa mère était secrétaire écossaise de la Campagne pour le désarmement nucléaire). Elle fait irruption sur la scène littéraire en 1991 avec le recueil de poésie The Adoption Papers (1991)[1], qui a remporté le prix First Book of the Year de la Saltire Society, le Scottish Arts Council Book Award et le prestigieux Forward Poetry Prize. Le recueil s’inspire de son expérience d’enfant métisse adoptée et de sa recherche de sa mère biologique. À travers les voix en contrepoint de la mère adoptive, de la mère biologique et de la fille, les poèmes explorent la quête d’identité culturelle de l’enfant adopté à l’issue de laquelle elle découvre que l’identité n’est pas une entité transmise par du matériel génétique et ne saurait être assimilée à des origines généalogiques. Cette découverte est de nouveau affirmée dans Life Mask (2005), dans la série de poèmes retraçant la rencontre de Kay avec son père biologique au Nigeria, et dans ses mémoires autobiographiques Red Dust Road (2010)[2], dans lesquels son père, qui s’avère être un chrétien fondamentaliste conservateur, offre un accueil des plus réservés à sa fille athée et lesbienne qu’il considère comme l’incarnation de « mon péché passé » (« Things Fall Apart »). Dans le poème « Things Fall Apart », Kay décrit son parent biologique comme « Moins chair que terre noire ; moins sang que poussière rouge / … plus éloigné de moi que Chinua Achebe », l’amenant à redéfinir sa généalogie en imaginant des chaînes de transmission (culturelles) alternatives.
L’impact de l’esclavage sur la culture et l’identité noires est au cœur du deuxième recueil de poèmes de Kay, Other Lovers (1993), tandis que Off Colour (1998) traite des questions de santé et de maladie, non sans un certain humour noir. Les poèmes donnent voix aux laissés-pour-compte de la société, aux malades, aux ringards, aux obèses et aux personnes d’âge mûr ; la langue glisse avec une grande fluidité entre l’anglais et l’écossais. Une sélection de ces premiers recueils peut être trouvée dans Darling: New and Selected Poems (2007). The Lamplighter, un poème dramatique sur la traite transatlantique des esclaves, a été diffusé sur BBC Radio 3 la même année ; et Fiere (2011), recueil de poèmes lyriques sur l’amitié, a été présélectionné pour le Costa Poetry Award 2011 et le prix First Book of the Year 2011 de la Saltire Society. Le recueil de poésie le plus récent de Jackie Kay est Bantam (2017), présenté comme « un livre sur l’esprit combatif », qui « traverse les frontières, de Ranoch Moor à la Somme, du Brexit au pays des Brontë… des poèmes qui chantent ce qui nous relie, et déplorent ce qui nous divise ». Il contient le magnifique « Threshold », premier poème que Kay a écrit en tant que « Scotland’s Makar », ou Poète National de l’Ecosse, poste qu’elle a occupé de 2016 à 2021, et qui fut lu à l’ouverture de la cinquième session du Parlement écossais en 2016.
Bien qu’elle soit surtout connue en tant que poète, la production littéraire de Kay traverse les frontières génériques pour englober le théâtre, la fiction (romans et nouvelles), les mémoires et la littérature pour enfants. Son premier roman, Trumpet, publié en 1998, a reçu le prix du Guardian Fiction. Elle a publié plusieurs recueils de nouvelles, Why Don’t You Stop Talking (2002), Wish I Was Here (2006) et Reality, Reality ( 2012), un roman pour enfants, Strawgirl (2002), ainsi qu’un recueil de poésie pour enfants, Red, Cherry Red (2007), qui a remporté le prix de poésie CLPE (Centre d’alphabétisation dans l’enseignement primaire) en 2008. Son œuvre continue de sonder le thème de l’identité en tant que singularité et sentiment d’appartenance collective ; il véhicule « une croyance sans faille dans le pouvoir des histoires et des poèmes non seulement pour promouvoir la compréhension et l’empathie, mais aussi pour révéler, rendre digne et transformer des vies » (Susan Tranter, 2008). En 2006 Jackie Kay a reçu un MBE (membre de l’Ordre de l’Empire britannique) pour ses services rendus à la littérature.
[1] Traduit en français par Caroline Ziane sous le titre Carnets d’adoption (Montréal : Mémoire d’encrier 2017).
[2] Traduit en français par Catherine Richard sous le titre Poussière rouge (Paris : Métailié 2013).